Il découpait avec grande application une pêche, délicieusement ferme, en quatre quartiers à croquer.
Il se mit à dévorer le premier tout en augmentant subrepticement le son du Bolero de Ravel qui passait par là.
Il se demanda naïvement si c’était le Bolero qui exauçait ainsi la saveur de sa pêche.
Puis il s’assit et ne pensa plus à rien jusqu’à ce que les dernières notes aient été jouées.
Alors qu’il venait de s’achever, il eut cette curieuse pensée.
« Si demain, j’apprenais que j’étais le dernier survivant sur cette planète, mettrais-je fin à mes jours pour autant? »
Debout devant la machiné à café entrain de lui délivrer son breuvage quotidien, il dodelina de la tête en espérant trouver la réponse à cette question inutile.
« Sans doute nous obligeons-nous pour les autres?
Pour leur plaire, leur ressembler, les consommer? »
Puis il alla s’asseoir sur le canapé, et pris le temps de s’allumer une cigarette qu’il espérait l’aider à réfléchir. Il enclencha Kind of Blue de Miles Davis, supposant aussi qu’il pouvait détenir la réponse qu’il avait choisi de chasser ce matin.
« Si j’étais réellement seul par ici, sans doute que j’agirais plutôt ainsi.
Sans doute que tout stress aurait largement disparu aussi.
J’accepte ma solitude et même, je la chérie.
Mais je persiste encore à poursuivre des objectifs qui ne sont pas miens,
simplement destinées ou héritées de mes collègues humains…
…
Il faut que cela cesse définitivement! »
Alors il écrasa sa cigarette et retournera lire cet ouvrage merveilleux écrit par un de ces collègues humains.
« Il ne s’agit pas de s’enfermer » pensa-t’il en feuilletant les pages de ce nectar de lettres
« Juste ne pas se laisser polluer,
Juste ne plus les polluer! »