L’être humain est éduqué pour se construire autour de ses peurs.
Logiquement, il consacre donc une énorme énergie à construire une vie dans laquelle il peut se contenter de patiemment attendre que la mort arrive.
Car à quoi bon prendre le risque de vivre quand tout autour n’est que souffrance et malheur potentiel ?
Une fois un quelconque cocon mis en place, l’être humain peut enfin se détendre en égrenant les rengaines sans intérêt de ceux qui attendent sagement la mort.
« Tu te souviens quand… »
« Ca me met un coup de vieux… »
« Une année de plus ! »
« Ce qu’elle a grandi dis donc… »
Parfois l’être humain s’interpelle par l’absurdité de ce cocon dans lequel il s’est enfermé tout seul.
Ce n’est bien souvent qu’alors que la mort de son corps approche que l’être humain finit par accepter de le voir pour ce qu’il est.
Une geôle.
Dans laquelle il a accouru, convaincu par les cris illuminés de la foule de ses semblables qui lui ont juré que là résidait la vie.
Que là résidait sa vie.
Quelquefois, l’être humain se met alors à regretter.
Pour le moins à douter.
Plus rarement, à pleurer sur lui-même d’avoir pareillement colporter auprès de ceux qu’il a aimé, la parole d’une vie qui n’était pas la bonne.
Mais plus souvent, ne pouvant légitimement accepter le poids de cette culpabilité, de crainte de devenir fou, il se dit que finalement il se racontait là de drôles d’inepties.
« C’est la vie » pensera-t-il souvent, se permettant ainsi de continuer à se mourir un peu plus chaque jour.
Qu’après tout, si il y a une chose que l’expérience des années lui a appris, c’est qu’il n’a fait que se soumettre à ce qu’elle était.
« C’est la vie que j’ai choisi » ajoutera-t’il parfois, comme pour justifier les souffrances que ses peurs lui ont infligé toute sa vie durant, et parer à tout début d’argumentaire sur la possibilité d’une autre.